Formulée pour la première fois il y a une dizaine d’années, la proposition de créer une OME, instance internationale spécifiquement missionnée pour des traiter des questions environnementales, est une idée qui semble de plus en plus s’imposer dans les esprits.
Cette opportunité est officiellement défendue depuis le Sommet de Johannesburg de 2002 par la France, qui travaille depuis un certain temps déjà à la transformation du Programme des Nations Unies pour l’Environnement en une agence spécialisée faisant partie de la famille des Nations Unies, l’Organisation des Nations Unies pour l’Environnement (ONUE).
Voyons quelles sont les raisons ayant présidé à la mise en place d’une telle organisation avant de mettre en évidence les initiatives à l’origine des premières démarches en vue de sa création.
I- LA JUSTIFICATION DE LA CREATION D’UNE ONUE
Alors que, sous l’égide de l’ONU, les marchandises sont placées sous le régime de l’Organisation Mondiale du Commerce, il apparaît en revanche que « la nature ne bénéficie d’aucune instance de régulation mondiale à la hauteur alors qu’elle se dégrade à grande vitesse », selon les propos émis par les ONG lors de l’affirmation de leur position commune. La création d’une ONUE se justifie donc.
Après avoir mis en évidence les lacunes du système actuel des Nations Unies pour l’environnement présidant à la création de la future Organisation, il conviendra de se pencher par voie de conséquence sur son utilité.
A - Les lacunes du système actuel des Nations Unies pour l’environnement
Le système actuel pour la gouvernance mondiale de l’environnement est non seulement faible et fragmenté mais il manque également de vision d’ensemble, d’autorité et de légitimité.
Si les lacunes du système actuel des Nations Unies pour l’environnement s’expriment essentiellement à travers l’inadéquation du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE), nous verrons qu’elles trouvent également leur origine à plusieurs autres niveaux.
1- les lacunes liées à l’inadéquation du PNUE
Malgré la création du PNUE en 1972, à l’occasion de la première conférence des Nations Unies sur l’environnement de Stockholm, ses moyens et sa visibilité demeurent très insuffisants au regard de l’ampleur de la tâche.
En effet :
- il ne dispose ni d’un pouvoir normatif, ni d’un pouvoir exécutif : de par son statut de programme, son pouvoir se limite à émettre des recommandations par voie de conséquence non contraignantes,
- il ne peut faire jouer aucun pouvoir d’articulation ou d’arbitrage du fait de la fragmentation des pouvoirs liés à l’environnement existante au sein de l’ONU : en effet, de nombreux programmes et organisations détiennent des pouvoirs en matière d’environnement,
- il manque de moyens financiers et son budget reste trop modeste : de par son statut, le PNUE ne dispose en effet pas d’un budget autonome et les fonds dont il dispose proviennent en grande partie des Nations Unies et des contributions volontaires,
- il utilise de manière défectueuse le peu de moyens financiers dont il dispose,
- il manque d’autorité et de légitimité au sein dus système de gouvernance mondiale.
2- les lacunes liées à l’inefficacité des Accords Multilatéraux sur l’environnement (AME)
En effet, ces AME :
- encore moins puissants que le PNUE,
- bénéficient de secrétariats squelettiques,
- sont peu coordonnés entre eux,
- subissent une carence dans leur application.
3- les lacunes liées à une architecture institutionnelle polarisée sur les préceptes du libre échange
L’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) ainsi que les institutions internationales toutes puissantes relèguent en effet l’environnement à un supplément d’âme éventuel.
En témoignent les résultats du deuxième Sommet de la terre de Johannesburg qui a fait de l’OMC le vecteur principal du développement durable !
Or cette organisation tend à pénétrer la sphère environnementale par le biais d’une assimilation des biens environnementaux à de simples marchandises, en faisant un interlocuteur institutionnel peu crédible.
Face au pôle marchand, il est donc nécessaire de créer un contrepoids qui permette à l’ONU, orpheline d’une agence spécialisée à l’environnement, d’afficher sa nouvelle priorité qui devrait être l’endiguement de la crise écologique globale.
La création d’une ONUE, se basant sur une réforme du PNUE existant, devrait être la traduction institutionnelle nécessaire de cette priorité et l’utilité de cette future organisation s’affirme donc.
B - L’utilité de l’ONUE
L’utilité de la création d’une ONUE s’affirme par conséquent pour pallier les lacunes précédemment identifiées dans le système actuel des Nations Unies pour l’Environnement.
Les besoins auxquels le future organisation va donc devoir répondre sont les suivants :
- assurer une meilleure visibilité et une plus grande force politique à l’action internationale dans le domaine environnemental pour pallier l’inefficacité du PNUE :
A l’heure actuelle, le PNUE et les conférences des Parties des grands accords internationaux partagent le pouvoir, sans qu’aucune instance ne soit investie du rôle d’arbitre, chose essentielle pour assurer une cohérence d’ensemble.
- conférer la cohérence et l’autorité nécessaires à la mise en oeuvre de politiques ambitieuses et efficaces pour la protection de l’environnement global,
- garantir une meilleure cohérence des AME,
- instaurer des relations plus équilibrées avec les autres organisations internationales telles que l’OMC, OMS, etc…,
- assurer la mise en place d’une stabilité financière, garantie par :
- des contributions obligatoires
Elles seraient établies selon un barème calqué sur celui des Nations Unies et permettraient de couvrir le budget de fonctionnement de l’ONUE (Voir Fiche 3, Caractères de la future ONUE),
- une rationalisation et une mutualisation de l’emploi des ressources financières
A l’heure actuelle, les périmètres d’actions des accords multilatéraux régissant l’environnement se recoupent parfois, alors que les défis à relever sont d’une telle ampleur qu’ils requièrent des moyens très importants.
C’est dans cette perspective qu’on pourrait inventorier celles de leurs fonctions susceptibles d’être mutualisées.
- établir une structure organisationnelle à vocation universelle disposant d’une réelle autorité et légitimité dans le système de gouvernance mondiale (Voir Fiche 3, Caractères de la future ONUE),
- mettre en place un cadre plus démocratique (Voir Fiche 3, Caractères de la future ONUE).
- assurer la mise en place de repères à destination de la communauté internationale et de l’opinion publique :
La création de cette organisation permettrait de faire comprendre au plus grand nombre l’importance cruciale des enjeux traités en matière d’environnement.
Malgré la complexité des problèmes liés à l’environnement et le fait que les préoccupations environnementales touchent tout le monde, il est donc surprenant que l’environnement soit privé de représentation institutionnelle.
II - LES INITIATIVES A L’APPUI DE LA CREATION DE CETTE ORGANISATION
* Les prémisses à la réflexion
PNUE, 4 avril 2001 (p31) ou les prémisses à la réflexion
* L’initiative, une initiative diplomatique française
2002, Sommet du développement durable de Johannesburg
Le Président de la République prend pour la première fois position devant la communauté internationale en faveur de la création d’une ONUE :
« (…) la France, fidèle à une tradition historique d’universalité que la mondialisation justifie chaque jour davantage, appelle à la création d’une organisation mondiale de l’environnement, sur les modèles de l’organisation mondiale de la santé ou de l’organisation internationale du travail ».
Il rejoint ainsi les nombreux réseaux de la société civile qui partagent cette volonté politique (voir Fiche 2, Réflexions et actions en faveur de la création d’une ONUE).
septembre 2003, Assemblée Générale des Nations Unies
Le président de la République annonce le lancement d’une initiative en faveur de la création d’une Organisation des Nations Unies pour l’Environnement, chargée de poursuivre trois objectifs en particulier :
- donner plus de force politique,
- renforcer la cohérence de l’action internationale,
- permettre aux pays en développement de construire et mettre en œuvre leurs politiques nationales de l’environnement.
L’initiative française prend en compte le processus de réforme du PNUE dit processus de Carthagène (24 mai 2000), comme démarche complémentaire à la création de l’ONUE.
* La naissance du groupe de travail ou « groupe des amis de l’ONUE »
La composition du groupe de travail
25 pays (Afrique du Sud, Allemagne, Belgique, Brésil, Burkina Faso, Canada, Chine, Colombie, Inde, Indonésie, Italie, Japon, Kenya, Luxembourg, Mexique, Nicaragua, Nigeria, Norvège, Sénégal, Suède, Suisse, République Tchèque, Royaume-Uni, Vietnam) + Commission Européenne
Les réunions du groupe de travail (Voir Fiche Les réflexions engagées en faveur du projet de création d’ONUE)
III - LES PREMIERS RESULTATS DES REFLEXIONS CONCERNANT L’ONUE
- Tenant aux caractères de la future ONUE (Voir Fiche 3, Caractères de la Future ONUE)
- Tenant aux moyens d’action possibles (Voir Fiche 4, Les moyens d’action de la future ONUE).
CONCLUSION
Pourquoi la réflexion est-elle aussi importante maintenant ?
Il y a une opportunité à saisir, celle de la réforme des Nations Unies, qui figure à l’ordre du jour du Sommet de septembre 2005 et qui pourrait « fournir une occasion exceptionnelle de s’interroger sur les conditions d’amélioration de cette gouvernance environnementale » ( Rapport du PNUE sur la Gouvernance mondiale de l’environnement, décembre 2004 ; Compte rendu Rencontre Débat sur l’initiative française pour la création d’une ONUE du 17 février 2005, M. Serge Lepeltier, Ministre de l’Ecologie et du Développement Durable).